Accélérer le diagnostic génétique de la maladie de Huntington
L’allongement de certains segments d’ADN provoque la maladie de Huntington ainsi que d’autres pathologies cérébrales. Des chercheurs soutenus par le FNS ont mis au point une méthode permettant de déterminer rapidement et facilement la longueur des gènes mutants.
La maladie de Huntington est une maladie cérébrale qui se traduit par des mouvements saccadés du corps et une diminution des facultés mentales. Elle aboutit habituellement à la mort entre 15 et 20 ans après le diagnostic. L’origine de la maladie a été identifiée dans une région du gène de la huntingtine, plus longue que chez les sujets sains. Cette mutation provoque la destruction des cellules cérébrales.
Une mesure en cinq minutes
Déterminer la longueur de ce gène est une opération de laboratoire fastidieuse, qui demande actuellement plus de cinq heures. L’équipe de Vincent Dion, professeur boursier FNS à l’Université de Lausanne, en collaboration avec le laboratoire d’analyse et d’architecture des systèmes (LAAS-CNRS) à Toulouse ont mis au point une méthode fiable qui permet de mesurer la longueur de la région d’ADN en cause et d’obtenir un résultat en seulement cinq minutes (*). Le diagnostic complet peut ainsi être au moins trois fois plus rapide.
Afin de procéder à l’analyse, l’équipe extrait l’ADN des cellules sanguines, amplifie la région en question et détermine sa taille grâce à une nouvelle puce, munie de deux chambres en forme d’entonnoir mesurant moins d’un millimètre. Une tension et une pression sont appliquées à ces minuscules chambres afin de séparer, selon leur taille, les fragments d’ADN chargés électriquement: les plus petits fragments sont poussés beaucoup plus loin dans l’entonnoir que les gros. En ajoutant un colorant fluorescent, les chercheurs peuvent détecter facilement la position exacte des fragments au microscope et en déduire leur longueur.
La longueur variable des fragments d’ADN résulte de la répétition de trois nucléotides du code génétique (CAG), typique des maladies à expansion de triplets telles que la maladie de Huntington. Cette mutation entraîne des changements encore mal compris mais destructeurs, puisque la protéine produite par le gène mutant est toxique pour les cellules du cerveau. Les sujets en bonne santé ne possèdent pas plus de 35 de ces triplets alors que la plupart des patients en ont 40, voire plus. Il est important de connaître la longueur exacte des séquences pour prédire l’apparition de cette maladie incurable et y faire face. "Notre méthode est plus sensible et plus rapide que celles qui existent actuellement", souligne Vincent Dion.
Ce projet a été mené à bien avec la collaboration de l’équipe d’Aurélien Bancaud au LAAS-CNRS à Toulouse, qui a développé et breveté l’instrument. Une licence a été accordée à l’entreprise Picometrics Technologies, qui développe cet appareil sous le nom de µLAS.
Couper les triplets délétères
La maladie de Huntington fait partie d’un groupe d’une vingtaine de maladies à expansion de triplets, qui comprend également l’ataxie spinocérébelleuse, le syndrome de l’X fragile, la dystrophie myotonique et l’ataxie de Friedreich. Il s’agit de maladies héréditaires, pour lesquelles il n’existe actuellement aucun traitement. Les travaux de Vincent Dion, qui a récemment mis au point une méthode pour raccourcir les fragments grâce à une approche basée sur l’outil CRISPR-Cas (**), font entrevoir un espoir. "Il reste cependant beaucoup de chemin à parcourir entre cette preuve de concept dans des cultures cellulaires et une application médicale potentielle", indique le chercheur.
(*) R. Malbec et al: µLAS: Sizing of expanded trinucleotide repeats with femtomolar sensitivity in less than 5 minutes. Scientific Reports (2018). DOI:10.1038/s41598-018-36632-5
(**) C. Cinesi et al.: Contracting CAG/CTG repeats using the CRISPR-Cas9 nickase. Nature Communications (2016). DOI:10.1038/ncomms13272
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- Télécharger l’image : (JPEG)Deux entonnoirs de moins d’un millimètre de large contiennent des échantillons d’ADN de différentes tailles, qui deviennent fluorescents sous l’effet d’un laser. À gauche, des fragments de taille connue. À droite, les fragments testés. Plus les fragments sont courts, plus ils se rapprochent du fond de l’entonnoir. © R. Malbec et al 2017.
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