Une piste pour éviter l’épuisement des globules blancs

© © M. Oeggerli (Micronaut 2019)

Des scientifiques soutenus par le Fonds national suisse viennent de trouver qu’un gène est responsable de l’épuisement des lymphocytes T. Une piste pour des immunothérapies plus efficaces.

Qui veut voyager loin ménage sa monture et qui veut lutter efficacement contre une tumeur ménage ses globules blancs. Plus précisément ses lymphocytes T – un type de globules blancs impliqué dans la réponse immunitaire aux cellules cancéreuses – puisqu’ils sont sujets à l’épuisement. Des scientifiques du département de biomédecine à l’Université de Bâle et à l’Hôpital universitaire de Bâle viennent justement d’identifier un gène qu’ils·elles considèrent comme impliqué dans cet épuisement. Leurs résultats sont publiés dans la revue Nature Communications (*) dans le cadre d’un projet de recherche financé par le Fonds national suisse.

Le problème de l’épuisement des lymphocytes T est connu depuis une vingtaine d’années. En raison de l’exposition chronique aux tumeurs, les lymphocytes T tombent au bout d’un moment dans une sorte d’état d’épuisement et deviennent moins efficaces: ils continuent à reconnaître les cellules tumorales mais produisent moins de substances permettant de les éliminer. Ils ne peuvent pas non plus évoluer en lymphocytes T mémoire, importants pour soutenir la réponse immunitaire. Cela compromet l’efficacité des immunothérapies qui sont justement basées sur la stimulation des propres défenses immunitaires contre les cellules cancéreuses. «Et nous rencontrons aussi ce problème dans le cadre des thérapies cellulaires anticancéreuses: même lorsqu’on injecte aux patient·es des lymphocytes T 'neufs', ils finissent par s’épuiser», explique Alfred Zippelius, coauteur de l’étude.

Un réglage fin de l’activité

L’équipe de recherche a donc souhaité mieux comprendre par quels mécanismes les cellules T s’épuisent. Pour ce faire, elle a développé un modèle à base de tumeurs humaines et généré des lymphocytes épuisés très similaires à ceux qui se trouvent dans les tumeurs de patient·es.

Elle a ensuite testé une grande quantité de gènes en les inactivant tour à tour avec l’outil CRISPR-Cas9. Ceci lui a permis d’identifier un gène qui régule le phénomène d’épuisement. Lorsque ce gène, appelé SNX9, est inactivé, les lymphocytes T restent fonctionnels même en présence prolongée d’une tumeur cancéreuse. «Le gène SNX9 semble augmenter la réponse immunitaire à court terme, ce qui peut s’avérer important dans les situations où chaque heure compte pour combattre une maladie. Dans le cas de notre expérience, la suppression de SNX9 a permis un réglage plus fin de l’activité des cellules immunitaires en réduisant les signaux de stimulation excessifs. L’activité des lymphocytes T a donc été conservée sur une plus longue durée», explique Marcel Trefny, premier auteur de l’étude. Autre enseignement tiré de cette dernière: au lieu de mourir une fois leur travail accompli, les lymphocytes T se différencient davantage en cellules mémoire. «La compréhension du rôle de ce gène ouvre des pistes pour améliorer les immunothérapies», résume Alfred Zippelius.

Cette découverte est prometteuse car jusqu’à présent, la plupart des tentatives pour déterminer l’impact de gènes sur l’épuisement des cellules T ont été réalisées sur des cellules de souris. Il s’agit donc d’une nouvelle étape, mais les pistes thérapeutiques doivent maintenant être testées cliniquement afin de vérifier si l’absence du gène peut entraîner des effets secondaires négatifs.

Soutien à la recherche dans toutes les disciplines

Ce travail a bénéficié de l’instrument «Encouragement de projets» du FNS. Après une procédure de sélection, il permet aux scientifiques de réaliser des projets de recherche sous leur propre responsabilité sur des thèmes et des objectifs de recherche de leur choix.

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