"Trop âgés pour faire des économies d’énergie ?" – La génération des baby-boomers dépense trop d’énergie pour le logement
Beaucoup de personnes vivent chez elles jusqu’à un âge avancé tout en gardant leur autonomie. Une étude du Programme national de recherche "Gérer la consommation d’énergie" a étudié le potentiel d’économies d’énergie de ces ménages de personnes âgées et cherché à savoir pourquoi il n’était pas exploité.
"Les conditions de logement des baby-boomers sont particulièrement intéressantes du point de vue énergétique : non seulement la surface occupée et la consommation d’énergie par personne augmentent avec l’âge, mais ces habitants jugent aussi leur logement trop grand pour eux", explique Heinz Rütter, responsable du projet de recherche "Potentiel d’économies d’énergie chez les ménages des personnes âgées". "Nous avons voulu savoir quel était le potentiel réel d’économie d’énergie et ce qui incitait les personnes âgées à optimiser leur consommation d’énergie de leur logement ou les en empêchait."
Diverses stratégies d’économie d’énergie pour y faire face
Grâce à des entretiens conduits avec des propriétaires de maisons et d’appartements, des locataires, des investisseurs, des exploitants et des gérances immobilières, trois stratégies d’économie d’énergie ont pu être mises en lumière chez les ménages de personnes âgées : (1) rénovations énergétiques ; (2) densification immobilière et sociale ; (3) déménagement dans un logement plus petit. Presque tous les propriétaires de maisons individuelles et d’appartements ainsi que les locataires sont de manière générale incertains quant à leurs futures conditions de logement et de vie et ont tendance à garder ouvertes un maximum d’options. Le moment où les enfants quittent la maison représente dans ce cadre un moment charnière.
Une enquête représentative effectuée auprès de la population de plus de 55 ans révèle néanmoins un potentiel d’économies considérable : 15 % des propriétaires de maisons individuelles prévoient un changement dans les 5 années à venir et 54 % l’envisagent à long terme. Parmi les propriétaires d’appartements, ces chiffres sont respectivement de 8 et 47 %. Malgré des conditions de logement et de vie hétérogènes, les motivations et les obstacles aux stratégies citées sont similaires. Les raisons invoquées pour une rénovation énergétique ou une densification sont souvent la volonté de protéger le climat et d’économiser de l’énergie. La densification du bâti (appartement indépendant dans la maison, pièce supplémentaire) et la sous-location sont un moyen pour mieux exploiter l’habitat et obtenir une valeur ajoutée et/ou un supplément de revenus, tout en augmentant le confort et en réduisant par ailleurs considérablement l’énergie grise. Une partie des personnes interrogées invoque aussi des raisons sociales pour vouloir partager un (grand) logement.
Le déménagement dans un appartement moderne et adapté à l’âge est surtout motivé par le désir de rester autonome le plus longtemps possible. Ce changement, perçu aussi comme une "libération" d’un excès de biens, incite bien souvent des parents et des amis à en faire de même.
"Est-ce encore rentable ?"
Les subventions publiques ne jouent qu’un rôle secondaire dans la décision de rénover ou de densifier le bâti. Beaucoup de personnes interrogées reculent devant des investissements aussi importants ou s’interrogent sur la rentabilité de telles opérations. Pour les propriétaires de maisons en particulier, le financement d’une rénovation en augmentant l’hypothèque ou par une nouvelle hypothèque est par ailleurs problématique. Avec un taux d’intérêt théorique de 5 % appliqué par les banques, beaucoup ne sont pas en mesure de garantir la capacité d’emprunt avant même d’être à la retraite. "C’est paradoxal : les jeunes sont trop jeunes pour obtenir une hypothèque afin d’augmenter l’efficacité énergétique de leur logement, et il est trop tard pour les personnes âgées", commente Thomas Ammann, de l’Association suisse des propriétaires fonciers (APF Suisse). "Le secteur financier et les instances politiques doivent s’impliquer si l’on veut exploiter le potentiel des logements anciens."
Comment avancer sur un sujet tabou ?
"Pour beaucoup de gens, la question du logement à la retraite est encore un tabou", souligne Heinz Rütter. "Il faut pourtant réfléchir à ses futures conditions de vie et de logement pour pouvoir réaliser des potentiels d’économies d’énergie. Il est vrai cependant que les institutions hésitent aussi beaucoup à se saisir de la question."
Il existe par conséquent un potentiel considérable pour motiver les personnes âgées à améliorer la consommation d’énergie de leur logement. Il faut pour cela innover et adapter le système existant, sans coûts excessifs pour la société, afin que les plus de 60 ans puissent encore contracter une hypothèque pour des rénovations énergétiques et une densification de leur logement. Il serait également utile d’offrir des incitations supplémentaires dans le cadre de la législation sur la construction, par exemple pour autoriser une utilisation plus dense tout spécialement pour les investissements dans des rénovations énergétiques.
Toutefois, l’étude montre que les incitations économiques ne suffisent pas à faciliter les choix individuels. Elles doivent être complétées par une approche liée aux valeurs (par ex. protection de l’environnement et du climat, responsabilité sociale) ainsi que par des offres d’information et de conseil complètes.
Les premières activités concrètes pour améliorer les conditions énergétiques des logements des ménages âgés sont en cours de réalisation avec APF Suisse, dans le cadre d’un projet de mise en œuvre du Programme national de recherche "Gérer la consommation d’énergie" (PNR 71).
Vidéo
Étude de cas d’une rénovation énergétique et de densification du logement dans une maison individuelle :
Vidéo: Les potentiels d'économie d'énergie dans les ménages des personnes âgées
Illustrations
PDF séparé avec les illustrations suivantes
- Besoins en surface des ménages par classe d’âge
- Changements des conditions de logement prévus et envisageables
- Estimation "Mon logement est trop grand pour moi" en fonction de l’âge
Contact
Heinz Rütter
Rütter Soceco AG
Weingartenstrasse 5
8803 Rüschlikon
Tél.: +41 44 724 27 70
Courriel heinz.ruetter@ruetter-soceco.ch
Programme national de recherche "Gérer la consommation d'énergie" (PNR 71)
Le Programme national de recherche "Gérer la consommation d’énergie" (PNR 71) du Fonds national suisse (FNS) se penche sur les aspects sociaux, économiques et réglementaires de la transition énergétique et étudie comment les acteurs privés et publics peuvent être incités à utiliser l'énergie de manière plus efficace. D'ici 2018, les 19 projets de recherche du PNR 71 présenteront des bases scientifiques dégageant des solutions concrètes qui serviront aux discussions sur la réalisation de la transition énergétique au niveau social en ce qui concerne la demande. Un transfert intensif de connaissances avec la société, la politique et l'économie projettera un éclairage nouveau sur les conditions générales et les évolutions économiques, juridiques, politiques, psychologiques et sociales susceptibles de favoriser ou, au contraire, d’entraver l’exploitation des potentiels d’efficacité ou de suffisance énergétique. Le programme développe et expérimente des mesures de pilotage, d'acceptation et de communication qui permettent de tirer parti de ces potentiels dans les ménages, les entreprises, les services publics et les transports. Du fait de leurs nombreuses interactions, le PNR 71 et le PNR 70 "Virage énergétique", menés en parallèle, sont étroitement coordonnés.