Cancer: mieux cibler l’utilisation de l’immunothérapie
Pour traiter les tumeurs, les médecins optent de plus en plus souvent pour la stimulation du système immunitaire des patients. Une équipe de chercheurs soutenue par le FNS a mis au point une méthode qui permet de déterminer en amont le potentiel de réussite de cette thérapie.
L’immunothérapie consiste à modifier les défenses immunitaires du patient de telle sorte que celles-ci puissent attaquer les cellules cancéreuses, stopper leur prolifération et voire les éliminer. Toutefois, seule une minorité de patients répond positivement à ce type de thérapie. Une équipe de chercheurs réunis autour d’un projet soutenu par le Fonds National Suisse (FNS) a découvert le moyen de prédire avec davantage de précision le potentiel probable de réussite de cette forme de thérapie sur les patients.
Démasquer les tumeurs
Le cœur de la méthode est constitué par une protéine (PD-1) logée à la surface des cellules de défense de l’organisme. Jusqu’ici, la protéine PD-1 était plutôt considérée comme le talon d’Achille du système de défense du corps humain, puisqu’elle offrait aux cellules cancéreuses un point d’ancrage leur permettant de résister aux attaques des cellules immunitaires. «C’est un peu comme si la tumeur se cachait sous un vêtement de camouflage», explique le directeur de l’étude Alfred Zippelius, médecin-chef suppléant en oncologie à l’Hôpital universitaire de Bâle. Grâce à l’immunothérapie, les récepteurs de la protéine PD-1 se trouvent bloqués et les défenses immunitaires peuvent à nouveau démasquer les cellules tumorales.
Le groupe de recherche international réuni autour d’Alfred Zippelius a justement constaté que les cellules de défense possédant les taux les plus élevés de PD-1 étaient les plus aptes à détecter une tumeur (*). En outre, ces cellules à forte teneur en PD-1 ont fonction de substances messagères, et attirent de ce fait d’autres cellules immunitaires, qui contribuent elles aussi à lutter contre le cancer. «Ainsi, les patients qui présentent un taux élevé de PD-1 ont une probabilité plus importante de répondre positivement à l’immunothérapie», commente Daniela Thommen, première auteure de l’étude et actuellement au Netherlands Cancer Institute à Amsterdam grâce à une bourse de mobilité du FNS.
Identifier les patients
A l’heure actuelle, l’immunothérapie ne fonctionne toujours que sur une minorité de patients. «Mais si nous pouvons prédire en amont les patients qui répondront positivement, nous augmentons le taux de réussite du traitement et pouvons ainsi réduire les effets secondaires et les coûts liés à la thérapie», avance Alfred Zippelius.
A partir de ces découvertes, les chercheurs veulent développer une méthode pour aider les médecins à décider quels patients seraient susceptibles de bénéficier d’une immunothérapie et lesquels devront opter pour un traitement plus intensif qui combine par exemple chimio- et radiothérapie. Les patients devront être classés en fonction du taux de PD-1 présent dans leurs cellules immunitaires.
L’immunothérapie ne cesse de gagner en importance. «Cette méthode a ceci de révolutionnaire que certains patients ayant suivi la thérapie pendant plusieurs années parviennent à une guérison complète – y compris ceux atteints de tumeurs ayant résisté jusque-là aux autres thérapies», indique Alfred Zippelius. L’Hôpital universitaire de Bâle a mis en place son propre groupe d’experts en immunothérapie.
Ce projet de recherche est issu d’une coopération entre l’oncologie médicale et la clinique de chirurgie thoracique de l’Hôpital universitaire de Bâle, le Netherlands Cancer Institute d’Amsterdam, l’Institut de pathologie de l’Hôpital cantonal de Liestal et le Roche Innovation Center Bâle.
(*) D. S. Thommen et al.: A transcriptionally and functionally distinct PD-1+ CD8+ T cell pool with predictive potential in non-small cell lung cancer treated with PD-1 blockade. Nature Medicine (2018). DOI: 10.1038/s41591-018-0057-z
Contact
Prof. Alfred Zippelius
Oncologie, Laboratoire d’immunologie tumorale, Centre des Tumeurs
Hôpital universitaire de Bâle
Tél.: +41 (0)61 328 60 16
E-mail: alfred.zippelius@usb.ch
Encouragement de carrières par le FNS
Le FNS encourage de manière ciblée la relève scientifique en Suisse. Ce soutien vise à assurer au plus tôt l’autonomie scientifique des chercheurs et chercheuses et à renforcer le positionnement de pointe de la place suisse en matière de recherche.
Daniela Thommen a obtenu de 2007 à 2010 une bourse MD-PhD pour un second doctorat en sciences naturelles et bénéficie depuis 2016 d’un subside Advanced-Postdoc.Mobility (désormais Postdoc.Mobility) pour un séjour de recherche au Netherlands Cancer Institute.
Alfred Zippelius a été soutenu de 2010 à 2013 en qualité de professeur boursier FNS (désormais Eccellenza) et est aujourd’hui titulaire d’une chaire clinique à l’université de Bâle.
La reproduction de l’image nécessite l’accord de l’auteur: info@micronaut.ch